La prise en charge des polytraumatisés fait l’objet de recommandations récentes. Pour les mettre en application et développer les structures adéquates, il est indispensable de connaître l’évolution de l’épidémiologie de la polytraumatologie.

Étude rétrospective observationnelle recensant l’ensemble des patients polytraumatisés hospitalisés dans une unité de réanimation chirurgicale de 1990 à 2012. Cette unité est la seule à être rattachée à un service de neurochirurgie dans une région de 2,3 millions d’habitants. Les données ont été collectées à partir des courriers de sortie. Quatre périodes de 5ans (1993 à 2012, P1 à P4) ont été comparées soit par un test du chi2 (ou test de Fisher), soit par une analyse de variance.

Au total, 3903 polytraumatisés ont été recensés. Le recrutement annuel était en baisse au cours de la période d’étude. Un tiers des patients étaient transférés vers le CHU après un passage dans un hôpital périphérique. L’âge moyen des patients était de 38,5±18,2ans avec une augmentation au cours du temps (37,3±1,5ans, P1 vs 40,0±18,7ans, P4, p=0,02). Le sex-ratio était stable de 3H/1F. Les hospitalisations pour polytraumatisme étaient plus fréquentes pendant les mois d’été. Les accidents de la voie publique représentaient 2/3 des causes de polytraumatisme mais leur part diminuait au cours du temps au profit des accidents de la vie courante (p<0,0001). Ceux ci étaient en majorité des chutes (57,1 %), des agressions (19,9 %) et des accidents de sport (8,3 %). Parmi les accidents de la voie publique la part des accidents de 2 roues était en constante augmentation (24,0 %, P1 vs 38,7 %, P4, p<0,0001). Le nombre d’organes lésés diagnostiqué augmentait au cours du temps (2,9±1,3, P1 vs 3,7±1,6, P4, p<0,0001). Le score ISS moyen était de 28,0±12,8. La principale modification thérapeutique concernait les pratiques transfusionnelles avec multiplication par 2 du ratio PFC : CGR en 20ans. Le taux de mortalité global était de 19,3 % passant de 23,4 % à 17,9 % de P1 à P4 (p=0,006). La principale cause de mortalité était la mort encéphalique (43,6 % des décès) suivie de l’hémorragie incontrôlable (31,4 %).

Les principaux changements en matière de polytraumatologie au cours des 20 dernières années concernent la diminution de la traumatologie routière, le vieillissement de la population et une meilleure accessibilité au diagnostic. Malgré les progrès thérapeutiques, la mortalité reste importante, justifiant le développement de réseaux de polytraumatologie.